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Cure Conservatrice Hémodynamique de l'Insuffisance Veineuse en Ambulatoire : Technique, Résultats

Amine Bahnini, Marc Bailly, Laurent Chiche, Claude Franceschi

Décrite il y a huit ans par C. Franceschi, la cure Conservatrice Hémodynamique de l'Insuffisance Veineuse en Ambulatoire (CHIVA) a maintenant atteint une maturité certaine. L'analyse hémodynamique préopératoire s'est affinée de même que celle des causes d'échecs ou de complications. Bien qu'elle ait été en Europe à l'origine d'un essor considérable du bilan préopératoire par échographie-Doppler de toute insuffisance veineuse superficielle (IVS), elle a souffert au cours du temps de la désaffection d'un certain nombre d'angeiologues et de chirurgiens et ce pour plusieurs raisons : 1) principalement du fait de la difficulté technique et du temps souvent très long de la cartographie préopératoire. 2) du fait de la minutie chirurgicale indispensable à son succès. 3) du fait de résultats médiocres entre leurs mains en rapport avec des erreurs de cartographie ou des malfaçons chirurgicales, elles-mêmes dues à une formation insuffisante à cette technique.

Malgré cette désaffection, plusieurs équipes en France et dans d'autres pays européens ont poursuivis leurs efforts avec des résultats bien étudiés satisfaisants montrant le bien-fondé des principes de cette technique.

PRINCIPES ET FONDEMENTS THEORIQUES

Principes

La cure CHIVA repose sur le principe suivant : quelle que soit la responsabilité de la paroi veineuse dans l'apparition des varices et de leurs manifestations cliniques, celles-ci ne peuvent se manifester que dans les conditions hémodynamiques pathologiques de l'orthostatisme. En d'autres termes, en décubitus, les manifestations objectives et subjectives de la maladie variqueuse s'atténuent puis disparaissent. La correction de l'anomalie hémodynamique devrait logiquement aboutir à un résultat équivalent à celui du clinostatisme.

La suppression des voies veineuses superficielles pathologiques par les techniques destructrices classiques aboutit à supprimer le vecteur de transmission des anomalies hémodynamiques et leurs conséquences pathologiques. Cependant, ces techniques suppriment du même coup les voies de drainages principales du sang veineux des tissus superficiels dans les veines profondes, prenant le risque de créer une circulation veineuse superficielle de suppléance, source de récidives. L'expérience montre que celle-ci est fréquente bien que souvent inapparente, les veines vicariantes se développant en profondeur et donc inaccessibles au simple examen clinique. La conservation du réseau veineux superficiel (RVS) aurait l'énorme avantage de préserver la fonction de drainage des tissus superficiels tout en conservant un capital veineux potentiellement utile dans l'éventualité future d'un pontage artériel périphérique ou coronaire. Bien que cette éventualité soit en pratique rare l'absence de capital veineux en cas de nécessite équivaut à une "perte de chance" pour les malades qui en aurait un jour besoin. Il est en effet démontré que des veines saphènes incontinentes conservent longtemps un calibre et une paroi correcte en faisant un excellent matériau de pontage au point que pendant des années les veines saphènes strippées conservées ont servies d'allogreffes en l'absence de veines autogènes dans des indications diverses, notamment pour les fistules artério-veineuses pour hémodialyse. De nos jours, même les partisans des techniques destructrices prônent une chirurgie sélective, "à la carte" limitée aux segments veineux pathologiques comme le stripping court ou la crossectomie-phlébectomie.

Fondements théoriques

Sans entrer dans les détails physiologiques et physiopathologiques. développés dans d'autres chapitres de cet ouvrage, la cure CHIVA se propose d'améliorer l'hémodynamique du RVS en fractionnant la colonne de pression hydrostatique et en déconnectant les shunts veino-veineux.

Pression hydrostatique

Chez le sujet (variqueux) en position debout immobile, la pression veineuse à la cheville correspond pour sa majeure partie à la pression hydrostatique qui équivaut au poids de la colonne d'eau entre le cerveau et la cheville. L'autre composante revient à la pression résiduelle qui correspond à la pression artérielle réduite par la perte de charge subie dans la micro circulation. Ces deux pressions concourent à séquestrer chez le sujet variqueux un volume sanguin stagnant important accru par l'hypotonie veineuse secondaire à l'atteinte pariétale veineuse avec chute du débit de drainage dans le réseau veineux profond (RVP). Cette séquestration s'accroît avec l'augmentation de tension de la paroi veineuse, proportionnelle à son rayon (loi de Laplace) et ce malgré le caractère constant et physiologique de la pression veineuse, équivalente à celle d'un sujet normal. Le maintien prolongé de cette pression conduit à l'ouverture de shunts arté-rio-veineux qui entraînent à leur tour une augmentation de la pression résiduelle aboutissant à un cercle vicieux. Le fractionnement de la colonne de pression, en l'absence de shunt veino-veineux aboutit à une diminution de la pression veineuse à la cheville et du calibre de la veine.

Shunts veino-veineux

Chez le sujet normal, la mise en marche de la pompe valvulo-musculaire corrige rapidement la stase veineuse en augmentant le débit du drainage et en diminuant la pression veineuse. La pompe augmente le gradient de pression motrice entre le RVS et le RVP favorisant la vidange unidirectionnelle du premier dans le second.

Chez le sujet variqueux, l'incontinence valvulaire génère un reflux du RVP vers le réseau RVS créant ainsi une circulation bidirectionnelle trappant un certain volume de sang circulant en circuit fermé appelé shunt veino-veineux (Figure l). La mise en jeu de la pompe valvulo-musculaire ne permet plus de diminuer efficacement ni la pression ni la stase veineuse. Ces shunts veino-veineux entre RVP et RVS coexistent souvent avec des shunt veino-veineux superficiels qui concourent à surcharger la veine de drainage du sang de territoires qui n'en sont pas directement dépendants.

Le fractionnement de la colonne de pression et la déconnexion des shunts veino-veineux permettent donc de diminuer la pression et de rétablir un flux unidirectionnel du RVS vers le RVP. Contrairement à ce qui se passe chez le sujet normal, ces flux de drainage unidirectionnels se font de façon rétrograde, dans le sens de la gravité qui contribue ainsi à leur bon fonctionnement (Figure 2). ll faut bien différentier ces flux rétrogrades des reflux qui se définissent comme le passage de sang du RVP dans le RVS. De même nous choisirons comme définition de varice "toute veine du RVS n'assurant pas en permanence un drainage unidirectionnel, à débit et pression normaux, du sang des territoires qui en dépendent vers le RVP".

Fig. 1
Réseaux veineux des membres inférieurs et shunts de type I à IV (les segments figurés en blanc sont incontinents).

STRATEGIE

La stratégie de la cure CHIVA consiste à appliquer à chaque cas particulier les principes hémodynamiques de fractionnement de la colonne de pression et de déconnexion des shunts veino-veineux, tout en préservant les voies de drainage du sang veineux superficiel vers le RVP. Elle se base sur une cartographie hémodynamique précise.

Cartographie Elle doit être réalisée par un examinateur expérimenté connaissant parfaitement la technique, l'anatomie et l'hémodynamique du système veineux, au moyen d'un appareil performant d'écho-graphie -Doppler pulsé en s'aidant ou non de la couleur selon ses habitudes. Elle doit étudier le RVP des membres inférieurs (R1) sans omettre les gros vaisseaux intra-abdominaux (veines cave inférieure, veines iliaques), les troncs saphéniens (R2), leurs branches (R3), les branches faisant communiquer les troncs saphéniens entre eux (R4) (Figure 1), ainsi que les veines perforantes. La distinction entre tronc saphénien et branches fait appel au signe de l'œil: la veine saphène, contrairement aux branches, est toujours située dans un dédoublement du fascia qui donne à l'ensemble l'aspect d'un oeil en coupe transversale (Figure 3). L'échographie doit établir avec une grande précision l'anatomie du RVS, y compris les anomalies ou variantes anatomiques pouvant avoir une incidence sur le geste chirurgical. Le Doppler puisé analyse l'hémodynamique segment par segment, en position debout de haut en bas, en s'aidant de manœuvres de compression-décompression manuelle, de mise en contraction réflexe (manœuvre de Parana) ou volontaire du mollet (pompe valvulo-musculaire). Dans le but d'homogénéiser les termes, nous définissons un flux antérograde comme un flux de sens physiologique, un flux rétrograde comme un flux de direction inverse au sens physiologique, un reflux comme un flux allant du RVP au RVS et une valvule continente comme une valvule capable de s'opposer à un flux rétrograde ou à un reflux permanent ou intermittent. Les flux sont quantifiés de façon subjective.

Klick zum Vergrössern Fig. 2
A) Incontinence de la veine saphène interne et d'un réseau R3. B) Traitement par cure CHIVA avec interruption à la crosse, à l'origine du réseau R3 et sous la perforante de réentrée.

Au terme de l'examen, une carte représentant à la fois l'anatomic et les anomalies d'écoulement des flux à la marche est présentée sous forme de schéma. Il est alors possible d'établir un plan thérapeutique alliant fractionnement de la colonne de pression, déconnexions des shunt veino-veineux et drainage du RVS.

Fractionnement de la colonne de pression

Le fractionnement de la colonne de pression se fait par interruption des axes incontinents au ras de l'ostium d'une crosse incontinente, au niveau de la jambe juste en dessous d'une perforante continente ou non de calibre suffisant pour assurer le drainage ou en dessous d'une branche collatérale drainante, aboutissant elle-même à une perforante de bon calibre (Figure 2).

Déconnexion des shunts veino-veineux

La déconnexion des shunts veino-veineux RVP-RVS-RVP se fait en interrompant les axes superficiels incontinents au niveau d'une crosse incontinente, ou d'une perforante incontinente ne recevant pas de branche descendante ou en dessous d'une perforante incontinente si celle-ci reçoit des branches descendantes, en particulier lorsque cette perforante débouche sur une pompe valvulo-musculaire performante. Un même geste d'interruption tel qu'une section-ligature de crosse permet souvent à la fois de fractionner la colonne de pression et de déconnecter un shunt veino-veineux (Figure 2). La déconnexion des shunts veino-veineux RVS-RVS permet de supprimer les connections entre voies de drainage superficiel pouvant se surcharger l'une l'autre.

Fig. 3
Signe de l'Œil: la veine saphène interne est comprise dans un dédoublement du fascia donnant l'aspect d'un Œil sur une coupe transversale en échographie. 1) Branche de la veine saphène interne (R3), 2) Veine saphène (R2), 3) Veine profonde (R1).

Drainage du réseau veineux superficiel

II est essentiel, pour obtenir un bon résultat et éviter les complications de thrombose et de récidive par néoangiogénèse que la stratégie établie réalise un système parfaitement drainant, à basse pression et à débit élevé. Les interruptions réalisées doivent permettre que les flux rétrogrades de tous les segments isolés puissent se drainer correctement dans le RVP par une ou plusieurs perforantes appelées "perforantes de rentrée" (Figure 2). Celles-ci doivent être de calibre suffisant et déboucher sur une pompe valvulo-musculaire efficace qui permettra "d'aspirer" à la marche le sang du RVS dans le RVP.

Certaines conformations anatomo-physiologiques défavorables telles que l'absence d'une perforante de réentrée de calibre adéquat, l'existence d'une continence segmentaire du tronc veineux (Figure 4-6), l'inefficacité de la pompe valvulo-musculaire rendent le drainage absent ou insuffisant. Une erreur chirurgicale telle que la ligature malencontreuse de la perforante de réentrée aboutit au même effet. La stagnation sanguine consécutive à l'insuffisance de drainage sera cause de thrombose (Figure 5) et de surcharge des collatérales avec pour conséquence à terme une néoangiogénèse responsable de récidive. En cas de doute sur la capacité de drainage du SVS envisagé par la stratégie prévue, II vaut mieux soit ne pas faire l'intervention et attendre qu'une évolution rende les conditions hémodynamiques plus favorables, soit la cantonner à des gestes sûrs en réservant la suite du traitement à un temps ultérieur distant de plusieurs mois (Figure 4), soit traiter chirurgicalement l'obstacle par exemple en réalisant une deval-vulation segmentaire (Figure 6).

Klick zum Vergrössern Fig. 4
A) Shunt de type III avec continence segmentaire de la veine saphène interne. B) Section-ligature dans un premier tems à l'origine de la branche refluante corrigeant le reflux dans la VSI. C) Le reflux dans la VSI peut aussi persister et évoluer jusqu'à la perforante de réentrée. D) Ce dernier cas de figure autorise dans un second temps l'interruption de la crosse.

TECHNIQUE

Echomarquage

L'échomarquage est fait la veille ou le jour même de l'intervention de préférence par l'examinateur ayant établi la cartographie, sur le membre préalablement rasé ou épilé pour éviter d'effacer les marques en cas de rasage ultérieur. Il consiste à marquer au feutre sur le membre les sites d'interruption veineuse permettant de réaliser la stratégie prévue sur la cartographie ainsi que les phlébectomies éventuelles excluant les varices non drainables ou les réseaux R4 (Figure 7). Le nombre de sites d'interruption est limité au minimum nécessaire, en moyenne quatre à six. Le marquage est fait en position debout, en marquant la veine à interrompre par un trait en regard indiquant son siège et sa direction, et le site d'interruption par un trait trans versal coupant à l'endroit prévu le trajet de la veine. La précision du marquage est en suite véri fiée en position couchée, de préférence dans la position opératoire, hanche fléchie en abduction et rotation externe et genou fléchi, et éventuellement corrigée. Les veines sont marquées à l'endroit le plus facilement accessible par le chirurgien de façon à permettre l'abord le plus petit possible et éviter une recherche laborieuse source de dégâts des tissus sous-cutanés et donc de cicatrices inflammatoires ou d'hématomes locaux responsables d'un mauvais résultat esthétique et de varicosités. Cet abord peut être à distance du site d'interruption souhaitable mais il est toujours possible, une fois la veine isolée, de la disséquer jusqu'à l'endroit ou il faut l'interrompre. Le marquage est ensuite reporté sur le schéma de la cartographie, accompagné de commentaires de l'examinateur précisant la nature et la taille de la veine, le type de geste souhaité (section-ligature ou phlébectomie-exclusion), les éventuels écueils à éviter (veine doubles ou superposées, proximité du nerf saphéne, anomalie ou variante anatomique), la profondeur de la veine à rechercher ainsi que sa situation sus ou sous faciale ou sous-aponevrotique, et le site d'interruption s'il est différend de celui de l'abord.

Klick zum Vergrössern Fig. 5
A) Shunt de type III (même cas que Figure 4). B) L'interruption simultanée de la crosse et de l'origine du réseau R3 peut provoquer C) une thromobose (figurée en noir) du segment saphénien non drainé. D) La recanalisation secondaire aboutit au drainage du segment précédement thrombosé et à un CHIVA fonctionnel.

En dehors de cas particuliers, le marquage n'est réalisé que d'un coté. En cas de varices bilatérales, le traitement est réalisé du coté le plus atteint ou le plus symptomatique, le deuxième membre étant traité trois à six semaines plus tard. Les raisons en sont les suivantes : 1) la quantité de produit d'anesthésie locale reste dans des limites raisonnable; 2) l'intervention est de durée relativement courte (30 à 45 mn) la rendant facilement supportable par le patient (et le chirurgien !) ; 3) le fait de garder un membre non opéré permet au patient de reprendre immédiatement une déambulation correcte favorisant l'obtention d'un bon résultat ; 4) le marquage du deuxième coté permet de vérifier le premier et de marquer un éventuel geste complémentaire à réaliser simultanément.

Technique chirurgicale

Le patient est admis le jour même de l'intervention, à jeun. L'intervention est réalisée au bloc opératoire après désinfection du membre et installation de champs stériles.
L'anesthésie locale est faite, sauf contre indication, à la Xylocaïne, adrénalinée ou non, en soulevant un papule cutanée, et en restant superficielle sauf au niveau des crosses. En effet, la paroi veineuse est insensible, la survenue d'une douleur signalant la présence d'un nerf sensitif ce qui permet d'éviter son traumatisme. L'anesthésie locale s'accompagne le plus souvent d'une diazanalgésie légère destinée à limiter le stress éventuel du patient. L'anesthésie par bloc crural n'est utilisé qu'en cas d'abords nombreux ou de phlébectomies étendues en particulier dans les récidives après stripping. Dans de rares cas, une anesthésie générale au Diprivan (propofol) est faite à la demande de patients particulièrement sensibles, ou en cas de difficultés opératoires prévisibles, comme pour les reinterventions multiples au niveau des crosses.

Klick zum Vergrössern Fig. 6
a) Shunt de type III avec une valve continente en amont d'une perforante de réentrée. B) Dévalvulation à l'aide d'un stripper introduit par une branche après interruption de la crosse saphène aboutissant à la réalisation d'un CHIVA drainant (C).

Fig. 7
Exemple d'échomarquage cutané pré-opératoire par cure CHIVA du membre inférieur gauche.

L'abord de la crosse saphène interne est fait par une incision de 2 à 3 cm centrée sur le marquage, dans le pli de l'aine ou l cm au dessus chez les patients corpulents. Le tronc de la veine saphène est disséqué et suivi de bas en haut jusqu'à la jonction saphéno-fémorale, en disséquant suffisamment les branches collatérales pour mobiliser la crosse. Une première ligature de la veine saphène, au fil non résorbable, est faite en aval de l'abouchement des branches. au ras de celles-ci sans cependant étrangler leur ostium. Une ligature appuyée au polypropy-léne 2/0 est ensuite placée au ras de la jonction saphéno-fémorale sur la crosse mise en tension par l'intermédiaire de la ligature précédente tractée par l'aide opératoire. La crosse est ensuite sectionnée entre les deux ligatures. Le moignon proximale est ensuite isolé du moignon distaie par la fermeture du fascia par une bourse de polypropylène 4/0. Les branches sont respectées dans la mesure du possible. Cependant, il est souvent nécessaire d'en sacrifier certaines pour des raisons anatomiques, lorsqu'elles viennent se jeter au ras de la jonction saphéno-fémorale et quil n'y a pas matériellement la place de réaliser la section-ligature. Dans certains cas. une ou plusieurs branches sont identifiées comme refluantes lors du marquage et doivent être sectionnées et liées ou clippées. La conservation des branches non refluantes permet en théorie de conserver le drainage des tissus qui en dépendent, évitant ainsi la stase veineuse de ces territoires source de récidive par néoangiogénése de compensation. Cependant, l'identification à l'échographie-Doppler préopératoire des branches de crosse refluantes n'est pas facile, en particulier en cas de fuite massive de la crosse. De nombreux opérateurs préfèrent donc, par commodité et pour éviter les récidives dues à un reflux de branche méconnu lors du marquage, réaliser une crossectomie complète réséquant les branches. L'utilisation de clips isolés et de ligatures sans section de la crosse est actuellement abandonnée du fait de la survenue de récidives par contournement de la ligature ou des clips. Le moignon de crosse est recouvert par le fascia qui est fermé par une bourse de polypropyléne 4/0.

L'abord de la crosse saphéne externe est fait par une incision transversale courte de l à 1.5 cm du creux poplité, au pli du genou, centrée sur le marquage. Même si la crosse est en position haute, ce qui est relativement fréquent, la veine est abordée dans la zone ou elle est superficielle et disséquée de bas en haut jusqu'à la jonction saphéno-poplité. En effet, l'abord directe en regard de la crosse, lorsqu'elle est en position haute, est malaisé sous anesthésie locale compte tenu de sa profondeur et de la proximité du nerf sciatique, obligeant à un abord large disgracieux. Après incision de l'aponévrose, la veine est soigneusement isolée du nerf saphéne externe qui lui est accolé. Les rares petites branches sont liées et sectionnées. La veine saphéne est ensuite sectionnée et liée au polypropylène 2/0 au ras de la veine poplité. La veine d'amont est réséquée sur 2 cm puis liée. l'aponévrose est fermée par un surjet de polypropy-léne 4/0. Il faut se méfier des variantes anatomiques nombreuses de la terminaison de la veine saphéne externe et notamment de l'abouchement des veines jumelles qui se situe à une hauteur variable. Il faut que celui-ci soit parfaitement identifié et situé sur le marquage préopératoire de façon à éviter de les lier. L'hémodynamique peut aussi amener à interrompre la veine en dessous de l'abouchement de la veine de Giacomini lorsque celle-ci présente un flux rétrograde se drainant dans la crosse saphéne externe. Les patients sont systématiquement traités par une héparine de bas poids moléculaire (HBPM) à dose préventive pendant huit jours compte tenu du risque de thrombose du moignon de crosse saphéne externe et du risque d'extension de cette thrombose à la veine poplité. Une échographie-Doppler de contrôle est recommandée au 4" et 7" jour postopératoire pour renforcer en cas de besoin l'anticoagulation.

L'abord des autres sites de marquage est fait par de toutes petites incisions transversales mesurant 2 à 3 mm faite dans le sens des plis cutané. Les veines sont extériorisées a l'aide d'un crochet de dentellière de 1,5 à 2 mm en traumatisant le moins possible le tissu sous-cutané (Figure 8). La précision du marquage quant à la situation et à la profondeur de la veine est là fondamentale dans la qualité du résultat. Les veines sont sectionnées puis liées au fil non résor-bable en prenant soin d'en réséquer 2 à 3 cm pour éviter les chances de reconnexion (Figure 8). Les veines à exclure sont liées en amont et phlébectomisées en aval sur une longueur variable selon les besoins.

Les grandes incisons sont fermées en deux plans, avec un surjet intradermique au fil non résorbable pour la fermeture cutanée après instillation locale de rifampicine. Les micro-incisions sont fermées par un pansement collant stérile (Steristrip ou Lumiderm). Le pansement est complété par la mise en place au bloc d'une bande à contention légère allant du pied à la racine de la cuisse.

Le patient est autorisé à sortir quelques heures après l'intervention en fonction des doses de diazanalgésie. La déambulation immédiate est autorisée et encouragée. La bande élastique est remplacée au bout de 24 à 48 heures par un collant ou un bas à contention légère (contention 1 ou 2) a conserver 10 à 15 jours. Les fils sont retirés au dixième jour postopératoire. Une HBPM est prescrite en cas d'antécédents de thrombose veineuse, de thrombopathie connue. de circonstances anatomiques favorisantes (chirurgie de la crosse saphéne externe, ectasie saphénienne, CHIVA non drainant).

Problèmes techniques particuliers

Les phlébectomies associées

Contrairement à une opinion répandue, elles ne sont pas antinomiques avec la technique princeps de la cure CHIVA où elles avaient été décrites sous le terme "d'exclusion". Franceschi avait cependant déconseillé leur utilisation large du fait du risque d'apparition secondaire de télangiectasies en cas de suppression abusive d'une veine assurant le drainage d'un territoire superficiel donné. Elles sont couramment effectuées sur des veines qu'il est difficile d'affaisser malgré la réalisation d'un système drainant. L'exemple le plus typique en est la grande écharpe antéro-externe de cuisse atteignant la jambe, qui bien que drainée et moins volumineuse, reste visible suscitant le mécontentement esthétique des patients.

Les phlébectomies peuvent également être utilisées pour obtenir un résultat esthétique immédiat, sans le délai de 3 à 6 mois habituellement nécessaire pour constater la disparition des varices après cure CHIVA, en prenant le risque de voir apparaître des télangiectasies secondaires. Ces phlébectomies sont effectuées sur les réseaux R3 et R4.

Les continences saphéniennes segmentaires

Si une stratégie CHIVA est d'emblé réalisable sur des incontinences complètes de la VSI, elle est parfois difficile en cas de continence tronculaire segmentaire (Figure 4-6). Le segment continent peut empêcher de réaliser un système drainant, en bloquant le passage du flux rétrograde vers la perforante de réentrée, ce qui est source de récidive et de mauvais résultats.

Dans les shunts de type II la réalisation simultanée d'une interruption de la crosse et de la branche variqueuse aboutit à créer un segment non drainé de la VSI, dont le risque de thrombose postopératoire est élevé (Figure 5). Dans les incontinences sphéniennes courtes, on prend volontiers le risque d'interrompre la crosse pour éviter l'extension d'une éventuelle thrombose tronculaire à la veine fémorale commune. L'autre possibilité est de laisser en place la crosse refluante et de se contenter dans un premier temps d'exclure la ou les branches variqueuses. Le risque de thrombose tronculaire est faible à condition de lier les branches au ras de la veine saphène, de prescrire systématiquement une anticoagulation par HBPM à dose préventive, et de contrôler la perméabilité de la VSI par une échographie-Doppler au 3e jour pour éventuellement renforcer l'anticoagulation. L'évolution habituelle se fait en quelques mois vers l'apparition d'une incontinence complète de la VSI (Figure 4C). Dans un deuxième temps, l'interruption de la crosse et la section-ligature sous la perforante de réentrée permettent de réaliser le fractionnement de la colonne de pression et le drainage du RVS (Figure 4D). Cependant, dans certais cas, la VSI devient à nouveau continente et il n'est pas nécessaire d'interrompre secondairement la crosse (Figure 4B). Ces patients sont donc à surveiller et à traiter de principe en deux temps si cela s'avère nécessaire.

Lorsque le segment continent de VSI est court et qu'une valvule continente empêche le passage du flux rétrograde vers la perforante de réentrée (Figure 6), il nous est arrivé, pour permettre le traitement en un temps, de réaliser une dévalvulation du segment continent afin d'obtenir d'emblée un système drainant. La dévalvulation est réalisée par l'introduction par une branche variqueuse d'aval de la tige d'un stripper poussée à contre-courant jusqu'à la perforante de réentrée de façon à forcer la valvule continente (Figure 6). Cette technique n'est applicable qu'aux incontinences segmentaires courtes et nécessite un écho-marquage préopératoire précis .Elle n'est pas toujours facile et demande des conditions anatomiques particulières : branche collatérale et VSI de calibre suffisant, valvule peu résistante.

La cure CHIVA en deux temps

Le but de la technique est bien sûr de réaliser un traitement complet en un temps. Cependant un traitement en deux temps, ou plus, est nécessaire dans les circonstances particulières que sont : - Les shunts de type II que nous avons précédemment évoqués.
- Les situations complexes telles que les malformations veineuses, les varices essentielles évoluées diffuses, et certaines récidives après eveinage, le premier temps aidant à "éclaircir" une situation anatomo-hémodynamique confuse.
- Les ulcères veineux (Figure 9) pour lesquels le premier temps, effectué par des abords en peau saine permet d'obtenir la cicatrisation de l'ulcère et l'amélioration de la trophicité cutanée de la jambe autorisant dans un deuxième temps, réalisé trois à six mois plus tard, d'intervenir à la partie basse de la jambe pour compléter le traitement.

Fig. 8
Technique du crochet permettant d'extérioriser la veine à interrompre. La section-ligature comporte la résection d'un à deux cm de veine de part et d'autre (avec l'autorisation de l'Encyclopédie médico-chirurgicale).

Klick zum Vergrössern Fig. 9
A) Insuffisance veineuse superficielle responsable d'un ulcère avec hypodermite sévère figurée sous la forme d'une guêtre noire. B) Premier temps de la cure CHIVA avec section ligature de la crosse saphène et de branches refluantes en zone cutanée saine. C) La régression des lésions cutanées en 8 à 12 semaines autorise à faire des abords complémentaires D) sans risque de trouble de cicatrisation.

INDICATIONS

Pratiquement toute IVS peut être traitée par cure CHIVA sauf lorsque le tronc de la VSI est lui-même variqueux au point que sa conservation ne présente pas d'intérêt. Dans ce cas très rare, le risque de thrombose tronculaire est également important ce qui limite encore l'intérêt de la technique.

L'IVS symptomatique chez la femme en période d'activité génitale peut avantageusement être traitée par cure CHIVA plutôt que par eveinage. En effet, la grossesse risque de provoquer une récidive qui, après eveinage, emprunte des circuits anarchiques du fait de la suppression des tronc veineux, rendant le traitement ultérieur très difficile et peu satisfaisant, ce qui n'est pas le cas après cure CHIVA.
La cure CHIVA n'a pas d'indication chez les sujets grabataires ni chez ceux dont les veines superficielles suppléent une obstruction du RVP ou sont continentes.
La principale contre-indication à la cure CHIVA est l'absence de formation théorique et pratique à la technique aussi bien de l'hémodynamicien responsable de l'échomarquage que du chirurgien réalisant l'intervention.

RESULTATS

Les résultats de la cure CHIVA ont fait l'objet de plusieurs études. Une enquête d'auto-évaluation par les patients du résultat à trois ans a été réalisée en 1993. Sur 500 questionnaires adressés, l'auteur a obtenu 329 réponses dont 315 étaient exploitables. Soixante neuf pour-cent des malades étaient adressés pour des varices essentielles non traités, 20 % avait précédemment eu un eveinage et 11 % une cryochirurgie ou des phlébectomies et étaient adressés pour une récidive. Tous avaient été traités par cure CHIVA. Les complications précoces ont été une thrombose saphenienne dans 5 % (n=16) des cas, une phlébite profonde dans 0,9 % (n=3), un lymphocèle ou une lymphorrhée dans 1,5 % (n=5), une infection cutanée mineure dans 7,5 % (n=25), et des troubles de la sensibilité cutanée régressifs dans 20 % (n=65) des cas. Il est important de noter que 60 % des patients n'avaient eu aucun arrêt de travail, 8 % un arrêt de moins de 3 jours et 25 % un arrêt de 3 à 8 jours (93 % de patients arrêtés moins de 8 jours). Ce point prend toute sa valeur lorsque l'on sait que 70 % de la population étudiée avait moins de 60 ans et était donc en période d'activité professionnelle. Les résultats du traitement ont été jugés satisfaisant sur les symptômes dans 75,5 % des cas et sur l'esthétique dans 66,5 % (tableau l). Sept patients (2,2 %) ont nécessité une reintervention (3 strippings, 3 crossectomies itératives, et une phlébectomie) au cours de cette période. Seul 29 patients (9 %) ont eu recours à des scléroses de varices en postopératoire.

Tableau l : Auto-évaluation des résultats fonctionnels et esthétiques à 3 ans de la cure CHIVA
Résultats Fonctionnels
n(%)
Esthétiques
n(%)
Trés bon 118 (37,5) 96 (30,5)
Bon 120 (38) 114 (36)
Moyen 53 (17) 81 (26)
Médiocre 16 (5) 22 (7)
Nul 8 (2,5) 2 (0,5)
TOTAL 315 (100) 315 (100)

Tableau II : Résultats fonctionnels et esthétiques de la cure CHIVA à 2,8 ans
Résultats Fonctionnels
n(%)
Esthétiques
n(%)
Trés bon 530 (79) 470 (75)
Bon 91 (14) 91 (14)
Moyen et mauvais 47 (7) 65 (11)
TOTAL 668* (100) 626* (100)
* La disparité des deux totaux s'explique par le fait qu'il s'agit de groupes différents.

L'un d'entre nous (MB) a revu son expérience sur 4 ans (1991-1994) de la technique. Les deux dernières années n'ont pas été prise en compte pour avoir un recul suffisamment long. Neuf cent vingt dossiers ont ainsi été revus. Le recul moyen était de 2,8 ans (1-5 ans). Cent patients (11 %) ont eu une thrombose postopératoire. Cent dix patients (12 %) ont nécessité un geste complémentaire secondaire du fait d'un résultat initial incomplet, ou d'une dégradation secondaire. Les résultats fonctionnels ont été jugés chez les 626 patients ayant des symptômes fonctionnels en préopératoire et les résultats esthétiques chez les 668 patients ayant une préoccupation esthétique préopératoire. Ces résultats étaient satisfaisant respectivement dans 89 % et 93% (tableau II). La conservation d'une veine saphène interne utilisable pour un pontage a été évaluée chez 776 patients ayant fait l'objet d'un geste sur cette veine, les autres patients ayant été traités pour des varices siégeant dans un autre territoire. Chez 23 patients (3 %), la VSI était totalement inutilisable du fait d'une thrombose extensive ou de lésions pariétales étendues. Six cent soixante quatre patients (85 %) avaient conservé une VSI de longueur supérieure à 75 % de sa longueur initiale dont 590 (76 %) de longueur quasiment complète. Soixante treize patients (9 %) avaient conservé la moitié proximale ou distaie de la VSI, éventuellement utilisable pour un pontage artériel court ou un pontage coronarien. Les meilleurs résultats de la deuxième série par rapport à la première s'expliquent sans doute par le fait qu'il s'agit d'une série plus récente qui a bénéficié de l'évolution de la technique et de l'atténuation de l'impact de l'apprentissage, avec des indications plus poussées de phlébectomies en complément du traitement hémodynamique.

CONCLUSION

Bien qu'il n'y ait pas eu d'étude randomisée, les résultats à moyen terme de la cure CHIVA sont au moins équivalents à ceux du stripping avec les avantages d'une agression chirurgicale bien moindre et d'un coût social beaucoup moins élevé lorsque l'on prend en compte l'absence d'hospitalisation, la brièveté de l'interruption de travail, la rare nécessité de scléroses complémentaires.

Ce résultat ne peut cependant être attendu qu'au prix d'une formation approfondie à l'hémo-dynamique veineuse et à la technique chirurgicale et d'échomarquage, et du temps nécessairement plus long consacré par les praticiens à leurs patients. L'absence de formation n'explique que trop bien les mauvais résultats à l'origine de la prétendue inefficacité de la technique.



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