Editorial

« Cher Monsieur Djeyar… »

                                         

Ces quelques mots pleins d’amertume, à l’adresse de ce cher Monsieur Djeyar, de la part d’un groupe de jeunes qui, se reconnaissant dans certains idéaux, tels que l’autodétermination des peuples et la reconnaissance linguistique des minorités ethniques, jour après jour, travaille, afin de récupérer, chez les jeunes générations, un peu d’élan, un brin de souffle de liberté que trop de gens ont désormais perdu.. peut-être justement à cause d’épisodes comme celui que nous avons le devoir moral de condamner.. Parmi les initiatives de ce groupe la « Rencontre internationale des jeunesses minoritaires ». Un an de travail, en silence, pour établir un réseau de contacts avec d’autres réalités minoritaires. Un an de travail, en silence, pour crier tout haut à nos peuples frères, que la Vallée d’Aoste est bel et bien vivante et prête à affirmer ses droits d’autodétermination et de souveraineté, son envie de liberté face au phénomène de globalisation européenne et d’unité purement économique. Un an de travail, en silence, afin de trouver, dans d’autres réalités opprimées, telle que la nôtre, un peu de solidarité et une synergie d’action.. sans jamais oublier que l’Union fait la force (ou la devise de Djeyar ne serait pas plutôt « Chacun pour soi et Dieu pour ? ». Un an de travail, en silence, pour une manifestation qui, certainement- et c’est peut-être là notre « faute »- ne paye pas au plan électoral… Un an de travail, en silence… ce même silence qu’on devrait garder parfois, si l’on a un peu de jugeote, plutôt que de vouloir, à tout prix, exprimer un jugement qui plus est, déplacé,  incompréhensible, déloyal, et prétendre passer toujours pour le premier de la classe.. quand en réalité on ne l’est pas…

Ces quelques mots, aussi, afin de remercier, les délégations des peuples frères, les orateurs, les jeunes présents, nos élus, comme d’habitude absents, et surtout la Jeunesse tout entière, pour cette année de travail à un projet, dont le succès  ne revient qu’à elle.

 

Dans le "Peuple Valdôtain", Djeyar - pseudonyme à la puissante saveur américano-provençale - se livre à une critique qui, nous l'imaginons, se voudrait offensante pour les Universités d'Eté organisées par la Jeunesse Valdôtaine au mois de juillet. Nous disons " imaginons", parce que le style abscons et retors dans lequel notre auteur rédige ses propos, ainsi que certaines affirmations quelque peu ubuesques, nous font douter du sens qu'il faut attribuer aux propos de notre censeur.

Mais procédons par ordre : l’auteur anonyme  de l’article intitulé "Université d'été : archéologie paléo-politique ou service médical de réanimation ?" commence par une distinction : il y a ceux, dans le Mouvement de l'Union Valdôtaine, qui s'occupent sérieusement de la défense des minorités, comme M. Caveri (qui, en effet, a été l'invité de l'une des journées organisées par la Jeunesse), et ceux qui "cherchent" (on devine : sans y réussir) à suivre ce chemin. Notre auteur semble d'ailleurs soupçonner que ce n'est pas tout à fait aux mêmes minorités que s'adressent les efforts du Député européen et de la Jeunesse. Il certifie en effet que ceux qui se sont exprimés à Pollein sont "tout ce qui reste de la pauvre carcasse de la gauche européenne “ vecchia maniera ”, en rassemblant à Pollein les nostalgiques de la monarchie italienne depuis la Catalogne jusqu'à l'ancienne république soviétique d'Emilie-Romagne d'avant le mur" (sic !). Avant de continuer par cette véritable perle : "Un bravo donc aux jeunes de l'UV pour la réussite d'une opération qui se place entre les familles archéologiques et l'évocation nécromantique, en passant par les services médicaux d'urgence" (re-sic !). La gauche catalane serait donc pour la monarchie italienne (pour ceux qui n'étaient pas présents, le groupe des jeunes auxquels fait, en quelque sorte, allusion Djeyar, s'appelle Esquerra Republicana de Catalunya) … Les jeunes Emiliens (Emilia Nazione) invités (qui n'était pas présents, mais cela, il aurait fallu être là pour le savoir), seraient alors nécessairement les héritiers du P.C.I. des années d'avant le mur (avant 1961 ? La construction du mur de Berlin aurait-elle donc marqué un ralentissement des activités du P.C.I. ? Là encore, ce ne sont pas les mêmes livres que nous avons lus…).

Essayons d'y voir clair. Au risque de devenir ennuyeux, il nous faudra tout  expliquer clairement. La gauche communiste a-t-elle historiquement été en faveur des minorités ethniques ? Celui qui connaît un tant soit peu la "pensée" communiste et la vulgate qui en a été donnée, vous répondra sans doute non. "Superstructure", le sentiment national est destiné à disparaître lors de l'avènement du radieux paradis des travailleurs. Et, à plus forte raison, un "bon" communiste se doit de hâter cette "inéluctable" conclusion de l'histoire quand il peut le faire, c'est-à-dire, normalement, en agissant contre les plus faibles parmi les minorités ethniques du territoire étatique dans lequel il vit : ce que, par exemple, les Verts valdôtains (lire bien sûr : qui vivent au Val d'Aoste) ont toujours fait. Un communiste est toujours un "tueur" de minorités, d'une façon différente, plus froide, mais pas moins dangereuse que celle d'un fasciste.

Mais alors, un rassemblement communiste ne peut pas être sensible au problème des minorités, sinon pour les traiter comme "une anomalie à supprimer". Et donc, inversement, une manifestation où l'on traite de la dimension européenne des minorités ne peut pas être communiste. La question se pose alors de savoir où notre brave Djeyar est aller chercher l'idée qu'il s'agissait d'un rassemblement de monarchistes-communistes contre lequel il exerce son douteux sarcasme. Car ils n'y étaient pas, et ils n'auraient d'ailleurs pas pu, nous venons de le démontrer, y être. Une seule explication nous paraît à ce point-ci possible : Djeyar n'a même pas assisté à la manifestation, il s’est contenté de lire "La Stampa", il en a parcouru certains commentaires écrits par des lecteurs, et en a déduit hâtivement que, puisque l'un des groupes qui s’est produit, un soir, les "Modena City Ramblers", est de notoriété publique de tendance gauchiste, tout le reste devait l’être aussi. Ce groupe avait été invité - précisons encore cela au vu des difficultés de compréhension que certains manifestent – du fait qu’il aime chanter les opprimés, y compris ethniques, et que par conséquent il pouvait expliquer à quelques jeunes, perdus à l'extrême gauche, que le respect des minorités commence sur la porte de sa propre maison et qu'il y a peut-être contradiction à célébrer la résistance irlandaise contre les Anglais en même temps que l'on manifeste - par exemple - contre le français au Val d'Aoste. Mais, précisément, il ne s'agissait que d'un des événements de la manifestation. Car, autrement, il faudrait en déduire que Djeyar peut se permettre de traiter de "carcasse de la gauche européenne", dans l'hebdomadaire du Mouvement auquel il appartient, par exemple, le Président de l'Union Valdôtaine (M. Rollandin a parlé vendredi 28, sur "Le rôle de l'Union Valdôtaine dans la défense de l'identité valdôtaine : histoire et perspectives futures"). D'estimer une tentative de nécromancie l'intervention de Président du Gouvernement sur les Euro-régions (M. Viérin s'est exprimé samedi 29 sur "Les Régions frontalières et l'intégration européenne. Euro-régions : une nouvelle perspective pour l'Europe ?) ou celle du Président du Conseil (M. Robert Louvin, vendredi 28, "Le rôle des minorités dans la construction de l'Europe"). De qualifier l'intervention du Député italien et européen (M. Lucien Caveri, vendredi 28, "La défense des langues minoritaires : la Charte européenne et son application") de "service médical d'urgence", et de "famille archéologique" les leçons de deux professeurs universitaires parmi les plus connus pour leurs connaissances sur le thème de la protection des minorités (MM. les professeurs Roland Breton et Stéphane Pierré-Caps, vendredi 28 et samedi 29, "Introduction à la problématique minoritaire" et "Les minorités et l'organisation de l'Etat").

Comportement, avouons-le, que personne, même parmi les Verts ou les fascistes les plus grossiers - et Dieu sait s'il y en a, n'oserait tenir…

                                              

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